Depuis environ un mois tous les professeurs des établissements publics sont en grève. Ils réclament de meilleures conditions de travail, une levée de ressources pour améliorer les infrastructures et l’éducation dans le pays. Par exemple, dans les grandes villes, faute d’infrastructures suffisantes, les élèves sont divisés en deux groupes : il y a ceux qui vont à l’école le matin et ceux qui y vont l’après-midi, par manque de place dans les bâtiments. Jusqu’à aujourd’hui malgré les grandes manifestations partout dans le pays, le gouvernement ne veut rien entendre et maintient qu’il est impossible d’augmenter le budget de l’éducation. Ce temps de grève m’a permis d’aller à la rencontre des jeunes de Zapatoca, qui, libérés de leurs obligations scolaires, sont de fait beaucoup plus disponibles ; d’autant plus qu’ils errent un peu désœuvrés dans Zapatoca. Grâce également au travail réalisé sur l’axe éducatif du projet de coopération, j’ai appris à mieux les connaître et cerner ce qui fait leur quotidien.
De manière générale, leur journée commence à 6h45 le matin et se termine soit à 15h45 pour les plus jeunes, soit à 17h pour les autres. Passés ces horaires, ils font soit leur devoir, soit des heures de travaux généraux, ou vaquent à leurs occupations. Durant leurs années d’études, avant d’être diplômés de leur établissement, ils doivent effectuer environ 50h de travail social pour la communauté : cela peut être de l’aide à l’hôpital, comme à la mairie, avec les plus jeunes, ou participer au développement culturel de Zapatoca en faisant partie de la fanfare ou d’un groupe de danse folklorique. Pendant leurs deux dernières années, ils doivent réaliser en plus l’équivalent de 3 mois de stage leur permettant de se spécialiser et d’avoir déjà une certaine expérience professionnelle. A Zapatoca, le collège public (qui regroupe toutes les classes de 5 à 17 ans) a une spécialisation technique en mécanique, dessin industriel, commerce, électricité et menuiserie.
Même à des milliers de kilomètres, les jeunes de Zapatoca ne sont pas si différents des jeunes de chez nous ! Tous aspirent à d’autres horizons et rêvent de découvrir le monde. Ils aiment regarder des films et des séries, les jeux-vidéos, faire du sport… Ils sont tout autant accros à leur téléphone et aiment se retrouver entre amis dans les lieux de vie de la ville, à savoir le parc principal de la ville et le stade municipal.
La seule différence, à mon sens, est leur attachement à Zapatoca. Les jeunes aiment leurs traditions, leur cadre de vie et sont réellement conscients que leur vie de jeune colombien diffère de la majorité des jeunes des autres parties de la Colombie. Ce n’est pas exagéré que de dire que la vie ici est très agréable ! Ils aiment aussi beaucoup danser, notamment sur tous les rythmes colombiens. Ce sont des jeunes gens très dynamiques, et qui sont contents de tout, tout le temps, c’est assez impressionnant !
Malgré tout, l’absence de réelles opportunités les poussent à partir pour continuer à étudier ou pour se réaliser. Cela fait presque deux mois que je suis arrivée et j’ai pu moi-même constater que les 18-25 ans à Zapatoca ont un peu disparus (je ne désespère pas de me faire des amis de mon âge pour autant !).
Le dynamisme économique n’est pas, en effet, ce qui décrit le mieux la ville. Les jeunes préfèrent s’en aller un temps et revenir, pourquoi pas, quelques années plus tard à Zapatoca une fois leur situation stabilisée. Ils me disent être conscients de l’importance de rester sérieux à l’école pour ensuite pouvoir s’émanciper et partir plus facilement. Ils ont le sentiment que s’ils restent ici, ils ne vont pas s’accomplir et passer à côté de leurs aspirations de vie.
A vrai dire, les jeunes à Zapatoca sont assez limités dans leurs activités : pas de PROJO ou MJC ici, ni de cinéma ; la politique jeunesse de la mairie consiste surtout dans la prévention des différents risques (grossesses précoces, usages de drogue…). Mais les jeunes de Zapatoca aiment la nature qui les entoure : aller manger une pizza face à de tels paysages, c’est sûr, on ne s’en prive pas. Pour rappel, la ville est assez isolée dans la campagne colombienne, il n’y a pas moins de 2 à 3h de route avant de rejoindre la grande ville la plus proche.
En définitive, être jeune à Zapatoca, c’est vivre pleinement et surmonter quelques contraintes : le lot commun de bien des jeunes dans le monde !